
Alouna Traoré : « Je suis bel et bien chargé de mission à la Présidence du Faso »
Le Curieux d’Afrique a eu l’honneur de recevoir, le vendredi 20 décembre 2024, Alouna Traoré, ancien conseiller juridique du capitaine Thomas Sankara et unique survivant du coup d’État d’octobre 1987. Lors de cet entretien, il partage ses réflexions sur la gestion actuelle du Burkina Faso, tout en revisitant l’histoire des Tribunaux Populaires de la Révolution (TPR) à la lumière du procès concernant un détournement de 3 milliards de francs CFA au ministère de l’Action Humanitaire. Découvrez ses propos.
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Interview réalisée par Wendpayangdé Marcelin KONVOLBO
Le Curieux d’Afrique : Bonjour, Alouna Traoré.
Alouna Traoré : Bonjour à vous et à tous les lecteurs de Le Curieux d’Afrique.
Quels sont vos rapports avec le régime actuel du Burkina Faso ?
Le régime actuel s’inscrit dans la continuité des idéaux posés par la révolution d’août 1983. Il œuvre à concrétiser nos aspirations en luttant résolument contre l’impérialisme et la corruption. À ce titre, je soutiens pleinement ses actions et ses ambitions.
Il se murmure que vous avez été nommé chargé de mission à la Présidence. Confirmez-vous cette information ?
Oui, c’est exact. J’ai été nommé chargé de mission à la présidence. Je mets mon expérience et mes conseils au service de la bonne gouvernance et du développement de notre pays.
Quelle est votre appréciation générale des actions menées par le capitaine Ibrahim Traoré et son gouvernement ?
Je constate des progrès notables, tant sur le plan sécuritaire que sur le plan du développement. Le capitaine Ibrahim Traoré a su rétablir l’autorité de l’État, redonner confiance aux populations et mobiliser les énergies pour la paix. Le retour progressif des déplacés internes, qui reprennent parfois leurs activités agricoles, en témoigne. Cependant, il reste essentiel de maintenir cette dynamique et de rester vigilant. Avec un tel élan, je suis optimiste : la guerre contre le terrorisme pourrait bientôt céder la place à un autre combat, celui de l’indépendance économique et du développement durable.
En tant qu’ancien membre des Comités de Défense de la Révolution (CDR), quelles similitudes voyez-vous entre les actions des CDR et celles des « wayiyans » actuels ?
Les « wayiyans » incarnent une évolution naturelle des CDR. Que ce soit les Forces de Défense et de Sécurité (FDS), les Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP) ou les « wayiyans », ils partagent tous un objectif commun : protéger le pays et combattre l’ennemi.
Quels souvenirs gardez-vous des Tribunaux Populaires de la Révolution (TPR) ?
Les TPR avaient pour mission de juger les citoyens impliqués dans des détournements de fonds publics. À la différence du procès actuel, les accusés se défendaient eux-mêmes, sans avocat, conformément à l’esprit de la révolution qui prônait la responsabilité individuelle. Certains ont su plaider leur cause et ont été acquittés, comme feu Aboubacar Sangoulé Lamizana et Gomis Naba. Leur objectif, tout comme celui du procès des 3 milliards, était de faire éclater la vérité et de dissuader toute tentative de malversation.
Que pensez-vous du procès concernant le détournement des 3 milliards de francs CFA ?
Un détournement de cette ampleur est inacceptable. Ce procès doit nous inciter à renforcer les mécanismes de contrôle et à promouvoir une gestion rigoureuse des ressources publiques. L’acquisition de biens de luxe par un fonctionnaire avec moins de dix ans d’expérience devrait systématiquement soulever des interrogations. À mon avis, l’abandon des TPR a contribué à la résurgence de la corruption. Si nous examinions les trente dernières années, de nombreux cas similaires seraient mis au jour.
Quels conseils donneriez-vous aux jeunes gestionnaires publics pour éviter ces dérives ?
Je recommande de renforcer les contrôles avant et après la prise de fonction, en exigeant une déclaration de patrimoine des gestionnaires de fonds publics. Dans certains pays, ces derniers prêtent serment devant les mânes des ancêtres avant de prendre leurs responsabilités. C’est une pratique que nous pourrions adopter. L’État doit également appliquer des sanctions fermes pour décourager toute tentative de détournement.
Depuis le 7 décembre 2024, Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo est le nouveau Premier ministre du Burkina Faso. Que pensez-vous de ce choix ?
Ce changement témoigne d’une volonté d’intensifier les efforts en cours. Rimtalba, bien que plus jeune que Kyélem, a déjà fait ses preuves. Il apporte une énergie nouvelle et devra continuer à démontrer son efficacité. Nous jugerons de son impact à travers les résultats qu’il obtiendra.
Quel message souhaitez-vous adresser au peuple burkinabè à l’approche de la nouvelle année ?
J’invite chaque Burkinabè à cultiver le respect mutuel, l’intégrité et l’engagement collectif pour la reconstruction du pays. Que chacun, dans son domaine, adopte un esprit de changement. La fonction publique n’est pas la seule voie vers le bonheur ; nous devons explorer nos savoir-faire et diversifier nos activités. Ensemble, nous surmonterons l’insécurité et améliorerons nos conditions de vie.
Un mot de fin ?
Que nos actions reflètent toujours notre Burkindlim. Que la paix et la prospérité reviennent au Faso.