Ce n’est un secret pour personne, la presse écrite patauge dans des eaux troubles ces dernières années. Elle traverse une période critique, confrontée à des défis multiples qui menacent sa survie. Longtemps pilier de l’information et du débat public, ce secteur se trouve désormais en proie à des difficultés croissantes qui mettent en péril sa pérennité. Que faire ? Beaucoup et peu de choses à la fois. Nombreux sont les journaux qui ont déjà mis la clé sous le paillasson. « L’Indépendant » « JJ » « 24heures » « L’Opinion » « L’Hebdo du Burkina » « Le Soir » « La Voix du Sahel » « Notre Temps », « Bendré », « Le Messager » « Infos Sciences Culture » « Le Nord » « Mutation », « La Cohésion » pour ne citer que ces titres ont cessé de paraître au pays des Hommes intègres. Récemment, « L’Evènement » a annoncé sa disparition ‘’temporaire’’ des kiosques à journaux. La pandémie médiatique semble traverser les frontières nationales pour embraser d’autres pays. A titre d’exemples on peut citer « Le Matin » en Algérie, « La Voix du Peuple » au Burundi ou encore « Le Libéral » en République Démocratique du Congo. Ces journaux imprimés ont disparu des radars après qu’ils eurent connu des moments de gloire. Et pourtant, la disparition d’un titre entraine automatiquement des cas de chômage.
Thank you for reading this post, don't forget to subscribe!Aussi, la non parution progressive de la presse écrite s’explique par plusieurs facteurs. La crise économique globale, exacerbée par le principal défi local à savoir l’insécurité, a impacté la presse écrite burkinabè. Les revenus publicitaires, traditionnellement une source cruciale de financement pour les journaux, ont considérablement diminué. Les entreprises locales, souvent en difficulté financière elles-mêmes, réduisent ou suspendent carrément leurs annonces publicitaires. L’on ne peut s’empêcher d’évoquer les pressions politiques qui ne favorisent pas la pluralité des opinions au regard du contexte actuel marqué par les attaques terroristes permanentes. A ces problématiques majeures pour la presse écrite, il faut ajouter la rareté et la cherté de la matière première, notamment le papier sur le marché international. Les coûts de production du papier ont augmenté au niveau mondial, principalement en raison de la hausse des prix de l’énergie, des matières premières nécessaires à la fabrication (comme la pâte à papier), et des contraintes logistiques liées au transport. Et comme si ces difficultés ne suffisaient toujours pas, bonjour la révolution numérique.
La montée en puissance des médias numériques est présentement un autre facteur décisif pour la survie des journaux écrits. Internet et les réseaux sociaux offrent des informations instantanées, souvent gratuites, rendant la presse écrite moins attractive. Face à ces difficultés réelles, certains journaux se voient obligés de réduire le nombre de pages ou la fréquence de parution, affectant ainsi leur contenu et leur attractivité pour les lecteurs et annonceurs. Les coûts logistiques élevés, associés à la baisse des ventes, rendent la distribution non rentable dans de nombreuses régions. Les zones rurales, souvent mal desservies, deviennent des déserts médiatiques, limitant l’accès à l’information pour une grande partie de la population.
S’adapter ou disparaitre
Il faut donc vite agir pour sauver cette « espèce » en voie de disparition. Pour ce faire, plusieurs solutions peuvent être envisagées. Ces solutions nécessitent une approche combinée impliquant des réformes structurelles, des initiatives innovantes et un soutien institutionnel. Sur le plan économique, les médias écrits doivent diversifier leurs sources de revenus au-delà des publicités traditionnelles. Cela peut inclure des abonnements numériques et des partenariats avec des entreprises. Les journaux peuvent développer leurs activités publicitaires en ligne pour capter une audience de plus en plus numérique. La presse écrite doit adopter les technologies numériques pour rester pertinents. Cela inclut la création de plateformes en ligne interactives, l’utilisation des réseaux sociaux pour diffuser les informations et engager les lecteurs, et l’exploration des formats multimédias comme les vidéos et les podcasts. La mise en place de services de notifications personnalisées et d’abonnements en ligne attractifs peut également encourager les lecteurs à privilégier les versions numériques.
Les journalistes et les équipes de rédaction doivent être formés aux nouvelles compétences numériques et aux outils modernes de gestion des contenus. Enfin, il y a l’accompagnement politique. Les gouvernements et les organisations internationales peuvent jouer un rôle important en fournissant des subventions ou des aides spécifiques aux médias écrits qui jouent un rôle crucial dans la diversité des voix et la qualité du débat public. Sa réduction risque de diminuer la pluralité des opinions et d’affaiblir la capacité des citoyens à obtenir une information variée et vérifiée. Au Burkina Faso, l’on peut se féliciter de l’existence du Fonds d’Appui à la presse privée (FAPP), qui chaque année octroie une subvention, à hauteur de 400millions de FCFA à la presse privée. En 2024, le montant a été revue à la baisse, soit 200millions.
Dans le même temps, le FAPP a constaté avec amertume que les entreprises de presse ne se bousculent pas pour contracter le prêt à leur alloué. Pourquoi ? Grosse question à laquelle les acteurs eux-mêmes ont du mal à trouver la réponse. Toujours est-il que la garantie ainsi que d’autres exigences du prêt ne sont pas faites pour arranger les choses. Voilà autant de difficultés qui laissent croire que la presse écrite survit en eaux troubles.